10 sept. 2014

NHS

Je suis allé voir le film de Ken Koach dernièrement, L'esprit de 45. Le cinéaste engagé rappelle comment la sécurité sociale est née en Grande-Bretagne. À la Libération, les Tories, les conservateurs, sont évincés du jeu politique et le Labour, le parti travailliste, tient des discours et un programme socialiste - très loin de l'employisme inquiétant d'un Blair.

C'est dans ce cadre que le gouvernement crée le National Health Service, le NHS. Les soins de santé (NHS, en anglais) deviennent gratuits et universels.

Par ailleurs, le gouvernement nationalise massivement les infrastructures industrielles. Les mines elles-mêmes seront nationalisées sans que les ouvriers ne puissent gérer eux-mêmes leur travail. Comme si les travaillistes avaient reculé devant l'ultime barrière du socialisme: la socialisation des moyens de production et la libération du travail concret, l'émancipation des producteurs. Les capitalistes sous la pression du gouvernement travailliste de l'époque ont accepté la nationalisation de l'énergie, des transports, de l'acier, du charbon mais n'ont pas été jusqu'à accepter le contrôle ouvrier.

Bref, la santé a été nationalisée mais, depuis la Dame de fer, elle est privatisée par petits bouts. Or, l'Écosse est une région où les pauvres sont nombreux. Mais les pauvres tiennent comme à la prunelle de leurs yeux au NHS, à la santé universelle et gratuite.

Comme l'explique cet article du Parisien (ici, en français):

La NHS (National Health Service) est une véritable institution en Grande-Bretagne, créée en 1948 par le gouvernement travailliste (gauche) de l'époque.
Deux tiers de siècle après, il s'agit d'une formidable machine de plus de 1,35 million d'employés, dont une cohorte de médecins directement payés par l'Etat, organisée en quatre branches régionales (Angleterre, Ecosse, Pays de Galles et Irlande du Nord). D'après l'administration britannique, seule l'Armée populaire de Chine, la compagnie de chemin de fer indienne et la chaîne américaine de supermarchés Wal-Mart emploient davantage de personnel dans le monde.
A tous les résidents du Royaume-Uni, la NHS garantit un service de soin gratuit, de la consultation pour un simple rhume à l'opération cardiaque complexe, aussi les Britanniques y sont-ils attachés malgré des critiques récurrentes sur les délais d'attente, le coût pour les finances publiques [dire que l'humain est un coût pour l'économie est une monstruosité, mais passons], la qualité des soins réputée moindre que dans le secteur privé [parce que la NHS est sous-financée depuis quelques décennies].
"En Angleterre, malgré les protestations, les principes fondateurs de la NHS (...) ont été écornés et trahis par les gouvernements successifs à Westminster", a accusé M. Salmond, qui dirige l'exécutif régional écossais depuis Edimbourg.
Ces derniers mois, nombre d'employés et d'usagers de la NHS sont montés au créneau en Angleterre. Dans le comté de Staffordshire, non loin de Newcastle (centre), un appel d'offres pour gérer les traitements des cancers, ouvert au secteur privé, a ainsi déchaîné un vent de colère.

L'insistance des indépendantistes sur les ressources pétrolières est totalement hors sujet: à la Libération, il n'y en avait pas or, du jour au lendemain, la santé est devenue un droit. Par contre, le renversement de tendance, la lutte contre la libéralisation des soins de santé peut se faire qu'il y ait du pétrole ou non. Derrière les velléités indépendantistes écossaises, il se pourrait que cette question, la question des services publics et des droits sociaux soit déterminante.

Reste encore à résoudre - quel que soit le drapeau - la question de l'émancipation du travail, comme le dirait Friot. Comment faire pour libérer notre travail de la propriété lucrative, de la soumission du travail à l'appât du gain, de la mise en concurrence de tous contre tous par l'aiguillon de la nécessité?

Mais, cela c'est une autre histoire.